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terres de soleil et de sommeil

mots : kongo et bem’na[1] à la fin d’une phrase et au commencement de la suivante. Mais ce qui nous émeut surtout, c’est ce refrain psalmodié dont chaque vers se termine par une note traînante, d’une infinie langueur. Ce « lā lā tè » est à pleurer... Quelle amusante découverte que celle que nous avons faite d’une parcelle de l’âme de cette femme kaka qui chantait la douce romance de l’enfant ! Quelle émotion de voir notre âme dans son âme, notre sensibilité dans sa sensibilité ! Quel événement de surprendre un peu de nous on elle, un peu de nos agitations de cœur dans son apparente animalité !

Nous avons bien souvent pensé à l’hypothèse de Joseph de Maistre qui veut que les nègres soient d’anciens civilisés dégénérés et non des peuplades en enfance. Sans pouvoir présenter aucun argument solide en faveur de cette théorie, nous avons eu souvent l’intuition de nous trouver en face de races arrivées au

  1. Kongo veut dire tête et bem’na enfant.