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terres de soleil et de sommeil

nuages bas dessinent des poches au-dessus des futaies, et, vers l’Est, il doit pleuvoir.

Une menace de tornade ne va point sans quelque énervement. Pourtant, à cette heure, nous éprouvons autre chose, plus que cet énervement, ou peut-être moins encore : une sensation très confuse qui nous entre dans la peau et nous cloue là. Cette nature nous dispense une sorte de lassitude animale qui est aussi un inexprimable découragement. La fatigue de la journée, la dispersion trop grande du paysage, l’électricité latente inclinent à la torpeur douloureuse et sans rêve.

Une sorte d’hébétude nous navre, l’hébétude qui suivrait une grande fatigue amoureuse. Nous n’eussions jamais cru qu’un paysage pût faire mal à ce point. La pluie tombe là-bas, très loin. Les contours des choses sont mous, comme dans un mauvais tableau. Tout se tait et ce silence est un drame.

C’est le silence unique de l’Afrique. II semble une grande attitude de néant. Nos campagnes ne savent pas se taire. Elles sont emplies tou-