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terres de soleil et de sommeil

tive, sans aucune des altérations qu’y apporte partout ailleurs notre civilisation envahissante. Là seulement on éprouve ce petit tressaillement du cœur à pénétrer dans des terrains vierges, parmi d’insoupçonnées barbaries. Sous les dernières latitudes inconnues, que de fois nous fûmes pris de ce léger vertige, assez voluptueux, parce que nous retrouvions la vie à sa source même, dans sa splendeur abolie. Là, nous avons surpris d’admirables gestes, et tout ce qui reste de beauté mâle et harmonieuse dans notre médiocre humanité.

Sur les rives brûlantes du Logone, de belles attitudes de victoire et de force, mêlées à de la grâce, ont revécu pour nous, que je croyais n’exister plus que sur les panses arrondies des vases antiques. J’ai été surpris de trouver ces hommes vénérables et de voir que leurs âmes allaient aussi en profondeur. J’y démêlais parfois d’obscurs frissons qui jusqu’alors ne me semblaient appartenir qu’à moi. Mais rien n’égale la joie de se sentir, parmi eux, le do-