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terres de soleil et de sommeil

s’y reprenant plus d’une fois. J’apprends à connaître leur vie et leurs pensées. Nos bœufs de France, obèses jusqu’à la difformité, semblent toujours des lauréats de concours d’animaux gras. Ceux-ci, même les plus gros, enfants de la brousse, ont gardé de la souplesse et de la force. Nul obstacle ne les arrête, leur docilité est merveilleuse. Jamais ils ne s’éloignent du troupeau et ils obéissent à la voix du Poullo qui les appelle par leurs noms.

En tête du long troupeau, marchent toujours les Bororos, espèce plus forte et plus musclée, avec des cornes longues et la robe brillante. Je les contemple avec amour. Sans hâte et sans désordre, ils marchent derrière le chef des Poullos, le grand Djani qui les connaît si bien… Nul bouvier de nos pays ne connaît ses bêles comme Djani connaît les siennes. Et quel air d’indifférence souriante et de distinction il a, ce Djani ! Il est presque blanc, avec des yeux infiniment doux. Son geste a toujours un air de noblesse et sa lèvre mince a beaucoup d’esprit. Il n’est pas exubérant comme les autres