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terres de soleil et de sommeil

des choses, et nous unit indissolublement à l’éternité ! Et je rêvais intensément, tandis que tout, autour de moi, reposait dans la béatitude de la sieste quotidienne, les lagunes dorées du Logone, les petites cases perdues dans la plaine désolée et la grâce vigoureuse des noirs adolescents…

Vers le soir, il semble qu’un peu de vie renaisse. L’horizon s’éloigne et les divers plans du paysage s’arrangent et s’organisent en un décor harmonieux. Du côté de l’Est, une caravane arrive, de gros bœufs porteurs, la corde au nez, chargés de sacs de peau et de blocs de natron.

Un petit baghirmien, perché sur un bœuf, se profile sur le ciel rouge. Puis des ânes suivent, au pas menu, tous pareils, robes grises avec une large bretelle de poils noirs à l’épaule. Puis un vieux, avec un boubou blanc et une grande canne… Ils viennent de très loin et ils ont marché toute la journée. Il y a peut-être des mois qu’ils marchent ainsi, pour gagner un peu d’argent qu’ils cacheront avec soin dans la grande