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terres de soleil et de sommeil

ble à celle du sol, semblent un accident naturel du terrain. Elles sont adaptées au pays même, comme les hommes sont adaptés à elles, et l’ensemble est d’une eurythmie reposante. Aux entours de la ville, c’est une unité, une simplicité pareilles. Les sables micacés des molles dépressions, l’éternelle argile violacée de l’Afrique donnent à la campagne de Binder un aspect clair, un peu rude et l’impression de quelque chose de minéral.

Point d’abondance ; mais cette sobriété même évoque des images de bonheur ; elle évoque les vies encloses dans la foi facile, sans passions fortes et sans excès. Elle donne l’idée de la vieillesse. Elle surprend, car elle semble receler des passés morts.

Lorsque j’entrai dans la ville, si préparé que je fusse à la comprendre et à l’aimer, je me trouvai surpris, dérouté. Pour la première fois, je sentis que je m’accordais vraiment avec les choses et les hommes. Ici, en pleine sauvagerie, après trois mois de route parmi la plus extrême barbarie, je rencontrais une âme,