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terres de soleil et de sommeil

à la mort eJle-même et léthargique. Elle me mit dans un état d’âme approprié et me prépara à voir la ville sacrée des Foulbés. Dès les premiers villages, Ellboré, Momboré, on croit respirer comme un parfum d’Islam. C’est une émotion étrange et délicieuse. Il semble que toutes les sévérités, toutes les aspérités de nos âmes chrétiennes disparaissent devant la grande, la définitive paix de l’Islam. C’est un engourdissement de tout l’être, un peu morbide, avec de la décomposition et de la pourriture, et un sensualisme, non point aigu, mais délicat et envahissant. Près d’un gommier en fleurs, j’ai vu, sur la route, un crâne et des ossements qui tombaient presque en poussière. La vue de ces débris et les douces odeurs qui flottaient sur toutes choses, me plurent également, comme des témoignages attendus. Je voulus voir, dans cet infime détail que j’ose à peine rapporter, un symbole de cette âme musulmane, la même toujours depuis l’hégire, la même partout, jusqu’aux confins de la Marmara, mais ici atténuée, adoucie, merveilleu-