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terres de soleil et de sommeil

où le coton, le chanvre, les girofles et les oignons poussent à l’envie[1] ».

A vrai dire, ce que j’allais surtout chercher à Binder, c’était le reflet d’un passé mort, l’émotion, jusqu’ici inéprouvée, de voir non plus seulement des maisons et des paysages mais dans ces maisons et dans ces paysages une histoire, une âme ancienne et perpétuelle la joie de se sentir, dans le présent même rattaché à des temps antérieurs, même mystérieux et voilés d’obscurité. Et j’espérais aussi deviner quelque chose de cette grande aventure des Foulbés, de leurs fabuleux voyages à travers l’Afrique, de leurs longs exodes de pasteurs et de nomades.

Je mis deux jours pour franchir les soixante kilomètres qui séparent Léré de Binder.

J’aurais voulu m’attarder davantage encore dans cette campagne triste et monotone, toute emplie du frêle et sensuel parfum des mimosas épineux, mais si pareille toujours, semblable

  1. Commandant Lenfant, La grande route du Tchad, Paris, 1905, pages 125 et 126.