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terres de soleil et de sommeil

Je me plais à suivre le jeu facile de ses muscles tendus comme un pur acier. Πόδας ὤχυς… C’est ainsi que je me représente Achille, et ce barbare est bien, je crois, l’idéal de la beauté grecque. Il est tel que ces éphèbes figurés aux métopes du Parthénon, nerveux et simples dans leurs attitudes juvéniles. Ainsi la beauté de la race — perdue chez nous — ici s’est conservée intacte, témoignage de ce que nous étions peut-être avant les vices de la décadence.

Dans le rayonnement de sa jeunesse, le jeune barbare m’adresse des paroles tristes et violentes. Il me dit :

— Tu me ressemblais autrefois, avant que les songes perfides des rêveurs n’aient empli ton âme et amolli ta force. Car alors tu vénérais cette force qui est la loi du monde et qui est bonne, puisqu’elle est la loi du monde. Et la force n’est-elle pas la beauté ? En perdant l’une, tu as perdu l’autre. Ton âme, héroïque jadis, est devenue molle et lâche, en même temps que ton corps a perdu sa vigueur première et son animale splendeur. Malheur à