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tion de délicatesse. Tout le monde approuvera les scrupules de ce jeune homme.

« Quand j’étais à l’armée… », ainsi parlent les vieux qui se souviennent. Maurice, lui, c’est déjà un vieux. Même Voulangis, il ne tient plus trop à le voir. C’est de là-bas, surtout, c’est d’Afrique qu’il comprenait son pays, qu’il le connaissait d’une pleine et mystérieuse connaissance. Maintenant, il est dans l’incertitude, battu des vents.

Cette Claire Monestier est vraiment une charmante fille. Elle s’ingénie à consoler son fiancé de cette peine, — parce qu’elle croit que c’est une peine. Elle ne peut pas savoir, — c’est forcé. Enfin, c’est une affaire ratée, mal engagée, qui traînera, lâchement, veulement, en longueur, qui s’étirera, avec des hauts et des bas, navrante, sans pleurs et sans sourires.

La douce France ! Il y venait, il y était. Son chaud parfum enflait sa narine. Les brises de l’Île-de-France l’enveloppaient… Mais l’Afrique revient à lui, pas douce, pas doulce du tout. C’en est fait de son bonheur, d’avoir connu ce grand déroulement d’espace ; c’en est fait de sa vie, d’avoir été un barbare, aux gestes libres, au cœur naïf, émerveillé.