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épandue autour de lui. Il se demanda si c’était celle du jour naissant ou celle de la lune, qui était entrée dans son dernier quartier. Il monta sur un rocher et vit le mince croissant très incliné sur l’horizon occidental, tandis qu’une ligne blanchâtre commençait de barrer l’horizon. Alors, il donna l’éveil à ses hommes. Tous se levèrent en silence, et, l’arme haute, se mirent à glisser entre les quartiers de roches.

Au bout d’une demi-heure, la petite troupe parvint au bord de la haute falaise qui tombait à pic sur la plaine dénudée du Baten. Le jour arrivait par ondes successives, et peu à peu, les quartiers de rocs apparaissaient, ils hérissaient la pente abrupte, ils se multipliaient jusqu’aux derniers éboulis, au pied de la muraille. Très loin dans le nord, les dunes de l’Iguidi déjà se teintaient de ce violet très pâle des aubes sahariennes. Et le silence faisait comme une présence divine inexorable. C’était une de ces minutes indicibles qui désempareraient l’âme la mieux trempée…

L’intense désir d’être au but, la frénésie de réussir, et cette adorable beauté des choses qui vous retient, vous courbe sous elle, c’est un des assauts les plus palpitants que puisse subir