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Nangès feuilleta un manuscrit richement relié et orné d’enluminures. C’était un commentaire du Koran rempli de logogriphes, de hadits disposés en étoiles ou en losanges. Mais le Maure arrête Nangès, et le voilà qui se met à lire pour lui les divines litanies, la voix tremblante, transfiguré.

Maurice, qui était là, se trouvait tout d’un coup transporté dans le divin. Pour un homme de son espèce, le saut était un peu rude. Il en restait étourdi pendant longtemps.


Dans leur marche vers le nord, ils passèrent à Char. Les sultans de l’Adrar avaient là jadis une forteresse, une sorte de grande ferme fortifiée, un bastion avancé qui aujourd’hui tombe en ruine.

Des ruines ! chose rare en Mauritanie. Mais à Char, les amateurs de pittoresque sont déçus. Ces timides essais d’architecture sont bien pauvres, bien médiocres. Il faut toute la volonté de Maurice à se créer des émotions — (heautontimorumenos, il s’inflige à lui-même des sensations violentes) — pour s’y complaire et y rêver. Pourtant, il y a une mosquée délabrée qui rappelle un peu les