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Vincent entrait de plain-pied dans tout un système nouveau. Il s’y perdait corps et bien. C’était une frénésie de perdition.

Un jour, la troupe rencontra un campement de Chorfas : quatre ou cinq tentes perdues dans les sables de la Maqter. Nangès s’installa à côté d’eux, pour quelques jours. Le chef était un homme encore jeune, mais il était grandement vénéré. Il passait pour détenir la baraka, l’étincelle de la toute-puissance déléguée par le Dieu unique. Tout le jour, assis loin des siens, il lisait et méditait la science divine. Maurice l’observait, tandis que le capitaine causait avec lui. Le Maure écoutait, mais son regard était plus loin, sa lèvre murmurait les dikr sacrés… Jamais peut-être dans le monde, les forces de la méditation n’ont été portées à une plus haute puissance.

Et aussi, comme la terre était complice ! Comme elle faisait un cadre unique à ce sombre mysticisme ! — Nangès alla visiter le cheickh :

— Je serais content de voir tes livres, lui dit-il. Le cheickh sortit de nombreux manuscrits de deux sacs en peau de bouc.

— Voilà le Beïdaoui, et le Nacih, et le Zamakschari…