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qu’il avait conservé, son regard clair d’adolescent candide.

— Alors, jeune explorateur, c’est pour aujourd’hui, ce grand départ ? dit-il gaiement.

— Mon Dieu, oui, Monsieur Monestier, je pars ce soir pour Marseille, où je m’embarque demain.

M. Monestier bourra lentement sa grosse pipe de bruyère.

— Eh bien, dit-il, tu as raison, petit. Ah ! si j’avais vingt ans, je ferais comme toi. Bonne chance, mon brave Maurice, la vie s’ouvre belle devant toi. Tu n’as qu’à marcher vers elle. Par exemple, tu sais, il y a la petite qui ne raisonne pas comme moi ! J’ai beau la sermonner, elle ne veut rien entendre. Mais tu vas la voir. Elle devrait être là déjà.

M. Monestier caressa sa barbe. Il avait un grand air campagnard, on ne sait quoi de rude, de noble dans sa personne, l’air d’un vieux routier habitué à l’air libre, au grand soleil des routes.

La porte s’ouvrit vivement. L’amie désolée parut. Et si joliment désolée, et pauvre, et misérable ! Et certes, elle ne tripotait pas nerveusement son mouchoir. Aucune larme ne perlait