Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/248

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

riche en muscles et en nerfs, toute prête à déborder et à se donner.

Près de lui, marchait l’inévitable D., plus rouge que jamais. Lui, il réalise un type assez fréquent dans l’arme. C’est l’officier savant, le mathématicien transcendant, et en même temps il a un esprit endiablé, une verve indulgente et bon enfant. On le juge peu militaire, bien qu’il ait été brillant jadis comme lieutenant. Tous l’aiment pour sa camaraderie, sa faconde, mais sa faconde d’homme du Nord. Nangès est lié à lui par une vieille amitié, un vieux compagnonnage de campagnes…

Maurice porta vivement la main à son képi. Nangès répondit au salut en fixant sur le jeune homme ses yeux bruns et luisants. C’est une joie pour lui de voir un si brave soldat. Il devine là le calme d’une conscience claire, un esprit pratique, et qui a comme une connaissance immédiate, intuitive, du devoir. Dans cette petite cellule humaine, dans ce minuscule organisme qu’est la pièce de Vincent, tout est parfaitement ordonné, tout fonctionne sans trouble, sans vaines agitations, sans mouvements inutiles. Vincent conduit ses quinze hommes comme Nangès conduit sa batterie.