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rêverie heureuse. Bien loin d’ici, dans la Brie, il y a aussi un petit village semblable à celui-ci. C’est sa terre à lui, c’est la terre natale, la terre patrie. Oui, son village, c’est une petite commune comme celle-ci, avec un maire, des conseillers municipaux, un garde-champêtre, un curé, et où il passe aussi des soldats, de temps en temps. Jamais Maurice n’a aimé sa terre et son clocher comme depuis ces journées de manœuvre où ils vont sur les routes, de village en village. La France ! Comme c’est grand et joli ! C’est à pleurer de joie de voir tant de noblesse épandue partout, tant de bonheur.

À l’entrée du village, il y a des jeunes gens, des paysans, des jeunes filles. Devant le chef d’escadron, à trente pas, les trompettes jouent. Les sabres sortent des fourreaux. Les filles rient de voir défiler les lourds artilleurs blancs de poussière. Elles sont jolies, et Maurice pense qu’il y a aussi, dans son village de Brie, une jolie fille qui l’attend et qui sera sa femme.

Sur la place communale, entre les arbres du paisible petit mail, le parc est formé. Les chevaux dételés et conduits en main emplissent déjà les quelques rues silencieuses du village. Et deux ou trois vieux, en grattant leur poil rude,