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Morin, l’heure brève près de l’amie, tout cela était loin déjà. C’était déjà son passé qui l’accompagnait fidèlement, le frêle bagage qu’il emportait dans l’immense et solitaire traversée…

Tout à coup, il eut une vision : Claire Monestier entrait dans la gare en coup de vent. Elle avait un gros paletot d’étoffe bourrue. Avec elle, il entrait un bon parfum de jeunesse, toute l’humide fraîcheur des foins quand ils sont coupés en automne…

— Oui, c’est moi. La voiture du père Laval partait. Alors j’en ai profité pour venir vous faire un dernier petit adieu. N’est-ce pas que je suis gentille ?

Maurice voudrait balbutier des mots d’amour, de reconnaissance… Il lui prend la taille. Il lui dit :

— Tu es folle, ma Clairette. Et tu vas rentrer toute seule dans la nuit noire ! Tu crois que c’est convenable pour une petite bourgeoise comme tu es !

Mais Claire ne répond pas, et se serre contre son ami. Elle voudrait pleurer et rire, et rire et pleurer. Son cœur est plein de tendresses printanières…