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il pas été soumis à une règle plus forte, plus impérieuse que toute règle humaine ? Son maître n’avait-il pas été ce pays d’histoire, tout humanisé, et qui sait pourtant si bien nous entretenir, non des choses éphémères, mais de l’éternel et du divin ?

Tout ici l’avait préparé à son actuelle destinée. Mais quand son parentage guerrier ou paysan lui parlait autrefois, il n’entendait qu’une voix confuse. Aujourd’hui, il s’étonnait moins de son invisible présence.

Dans la salle du premier étage, à l’aile gauche de la triste bâtisse, le père avait fait grand accueil au jeune brigadier. Il l’avait embrassé avec tendresse et était allé quérir une bouteille de vin. Il s’était enquis de la santé de son fils. Mais une vue l’irritait. C’était celle des galons rouges qui ornaient la manche de Maurice. Aussi, après les premières effusions, les mains posées sur la toile cirée de la table, contemplait-il, les yeux froncés, le fils qu’il sentait si loin, à cette heure, si loin de lui.

Le père Vincent faisait partie de la génération qui avait eu vingt ans en 1880. C’était celle des hommes qui avaient vu la défaite —