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n’y prenaient garde, ni ne pouvaient, à vrai dire, y prendre garde. C’est en dehors d’eux-mêmes que se faisaient leurs destinées.

Au fait, Maurice Vincent, qui apprenait par cœur les règlements d’artillerie et subissait la plus rude des initiations, ne pensait plus à rien. Le soir, après le pansage, et une fois la gamelle de rata avalée, il tombait sur son lit et ne tardait pas à s’endormir sur les « fonctions du pointeur » ou le « maniement du débouchoir ».

C’est dans l’épreuve que Maurice traversait, que sombre souvent la foi des médiocres. Lui acceptait tout parce qu’en tout, il percevait confusément une raison dernière. D’ailleurs, il abhorrait d’instinct la sensiblerie. Au 2e de l’arme, on avait conservé les bonnes traditions et cette sorte de rudesse mâle qui avait caractérisé l’armée française jusque vers 1890 environ. Là, les instructeurs étaient sûrs qu’ils s’adressaient à des soldats. Si, dans la chambrée, on disait qu’ « on en avait assez, de ce cochon de métier », personne n’était dupe et tout le monde savait que l’on était d’accord sur le fond. Tout se passait entre soldats.

Mais, en même temps que l’instruction militaire, Vincent en recevait une autre, purement