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les chevaux des civils. Un sacré boulot ! Mais le pèze rappliquait. Un jour, il passe une caravane d’Anglais : cinquante chevaux à ferrer. J’étais avec Planquet. Mon vieux, on y a passé la nuit. Mais ça nous a valu une pièce de cent cinquante francs. Ah ! c’était le bon temps !…

Oh ! oh ! voilà tout le souvenir qu’il a rapporté de cette vieille pourriture de l’Orient, de ses odeurs de volupté, de ses rêves malsains et tristes, de ses beautés de cadavre… Que l’on s’indigne, si l’on veut ! Maurice aimait autant ces humbles propos que toutes ces histoires de « sampans », d’ « arroyos », de « flamboyants », de « congais » dont on nous fatigue les oreilles depuis si longtemps ; il savait gré à ce maréchal ferrant de n’avoir pas le sens de la couleur locale…

Pendant que le vieux raconte son histoire, Maurice s’acharne sur ses basanes qui, naturellement, ne veulent pas reluire. Car c’est une chose que l’on ignore généralement, mais il est très difficile de faire reluire des basanes, surtout lorsqu’elles sont pénétrées d’humidité. Mais voilà que le voisin de lit de Maurice, un vieux à la face creusée de sillons épais, à la