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maréchal de Villeroy le laissaient seul au Palais Royal. Je tâchai d’arraisonner M.  le duc d’Orléans, je lui représentai l’injure qu’il faisait non seulement aux ducs, qui se sentiraient tous atteints en la personne du duc de Gramont, mais au bon sens, en laissant le prince Murat, comme autrefois les ducs de La Tremoïlle, sous le vain prétexte de prince étranger et de son grand-père, si connu par sa bravoure, roi de Naples pendant quelques années, avoir pendant le parvulo de Saint-Cloud, la main qu’il se garderait bien de ne pas exiger ensuite à Versailles, à Marly, et qu’elle servirait de véhicule à l’Altesse, car on sait où conduisent ces sourdes et profondes menées de princerie quand elles ne sont pas étouffées dans l’œuf. On en a vu l’effet avec MM. de Turenne et de Vendôme. Il y aurait fallu plus de commandement et un savoir plus étendu que n’en avait M.  le duc d’Orléans. Jamais pourtant cas plus simple, plus clair, plus facile à exposer, plus impossible, plus abominable à contredire. D’un côté, un homme qui ne peut pas remonter à plus de deux générations sans se perdre dans une nuit où plus rien de marquant n’apparaît ; de l’autre, le chef d’une famille illustre connue depuis mille ans, père et fils de deux maréchaux de France, n’ayant jamais compté que les plus grandes alliances. L’affaire du Moine ne touchait pas à des intérêts si vitaux pour la France.

Dans le même temps, Delaire épousa une Rohan et prit très étrangement le nom de comte de Cambacérès. Le marquis d’Albuféra, qui était fort de mes amis et dont la mère l’était, porta force plaintes qui, malgré l’estime infime et, on le verra par la suite, bien méritée que le Roi avait pour lui, restèrent sans effet. Et il