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PASTICHES

reprit la vicomtesse qui, sans comprendre exactement en quoi elle avait fait une gaucherie, regretta d’avoir été aussi démonstrative.

Ce que vous dites ne me surprend pas, ajouta-t-elle, car j’étais étonnée que Clotilde se fût éprise de quelqu’un d’aussi peu séduisant.

— Mais au contraire, personne n’est de votre avis, Claire, s’écria la princesse en montrant la comtesse de Sérizy qui écoutait.

Ces paroles furent d’autant moins saisies par la vicomtesse qu’elle ignorait entièrement la liaison de Mme de Sérizy avec Lucien.

— Pas séduisant, essaya-t-elle de corriger, pas séduisant… du moins pour une jeune fille !

— Imaginez-vous, s’écria d’Arthez avant même d’avoir remis son manteau à Paddy, le célèbre tigre de feu Beaudenord (voir les Secrets de la princesse de Cadignan), qui se tenait devant lui avec l’immobilité spéciale à la domesticité du Faubourg Saint-Germain, oui, imaginez-vous, répéta le grand homme avec cet enthousiasme des penseurs qui paraît ridicule au milieu de la profonde dissimulation du grand monde.

— Qu’y a-t-il ? que devons-nous nous imaginer, demanda ironiquement de Marsay en jetant à Félix de Vandenesse et au prince Galathione ce regard à double entente, véritable privilège de ceux qui avaient longtemps vécu dans l’intimité de Madame.

— Tuchurs pô ! renchérit le baron de Nucingen avec l’affreuse vulgarité des parvenus qui croient, à l’aide des plus grossières rubriques, se donner du genre et singer les Maxime de Trailles ou les de Marsay  ; et fous afez du quir ; fous esde le frai brodecdir tes baufres, à la Jambre.

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