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EN MÉMOIRE DES ÉGLISES ASSASSINÉES

sorte dans toute l’étendue de la montagne sainte[1] et où la paix de la terre sera délivrée de son présent chagrin, comme le présent et glorieux univers animé est sorti du désert naissant dont les profondeurs étaient le séjour des dragons et les montagnes des dômes de feu. Ce jour-là aucun homme ne le connaît[2], mais le royaume de Dieu est déjà venu pour ceux qui ont arraché de leur propre cœur ce qui était rampant et de nature inférieure et ont appris à chérir ce qui est charmant et humain dans les enfants errants des nuages et des champs[3]. »

Et peut-être maintenant voudrez-vous bien suivre le résumé que je vais essayer de vous donner, d’après Ruskin, de la Bible écrite au porche occidental d’Amiens.

Au milieu est la statue du Christ qui est non au sens figuré, mais au sens propre, la pierre angulaire de l’édifice. À sa gauche (c’est-à-dire à droite pour nous qui en regardant le porche faisons face au Christ, mais nous emploierons les mots gauche et droite par rapport à la statue du Christ) six apôtres : près de lui Pierre, puis s’éloignant de lui, Jacques le Majeur, Jean, Matthieu, Simon. À sa droite Paul, puis Jacques l’évêque, Philippe, Barthélemy, Thomas et Jude[4].

  1. Allusion à Isaïe, XI, 9.
  2. Allusion à saint Matthieu XXIV, 36.
  3. Cf. Bossuet, Élévations sur les Mystères : « Contenons les vives saillies de nos pensées vagabondes, par ce moyen nous commanderons en quelque sorte aux oiseaux du ciel ; ce sera dompter des lions que d’assujettir notre impétueuse colère. »
  4. M.  Huysmans dit : « Les Évangiles insistent pour qu’on ne confonde pas saint Jude avec Judas, ce qui eut lieu, du reste ; et,
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