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MÉLANGES

et encore plus les sculptures aussi délicates et plus calmes[1] qui sont au-dessus, qui racontent la propre histoire de saint Honoré dont on parle peu aujourd’hui dans le faubourg de Paris qui porte son nom.

« Mais vous devez être impatients d’entrer dans la cathédrale. Mettez d’abord un sou dans la boîte de chacun des mendiants qui se tiennent là[2]. Ce n’est pas votre affaire de savoir s’ils devraient ou non être là ou s’ils méritent d’avoir le sou. Sachez seulement si vous-même méritez d’en avoir un à donner et donnez-le joliment et non comme s’il vous brûlait les doigts. »

C’est ce deuxième itinéraire, le plus simple, et celui, je suppose, que vous préférerez, que j’ai suivi, la première fois que je suis allé à Amiens ; et, au moment où le portail sud m’apparut, je vis devant moi, sur la gauche, à la même place qu’indique Ruskin,

  1. « Remarquez que le calme est l’attribut de l’art le plus élevé. » (Relations de Michel-Ange et le Tintoret, § 219, à propos d’une comparaison entre les anges de Della Robbia et de Donatello « attentifs à ce qu’ils chantent, ou même transportés — les anges de Bernardino Luini, pleins d’une conscience craintive — et les anges de Bellini qui, au contraire, même les plus jeunes, chantent avec autant de calme que filent les Parques ».
  2. Cf. Mornings in Florence : « Mais je veux tout d’abord vous donner un bon conseil, payez bien votre guide ou votre sacristain. Il fera preuve de reconnaissance en échange de vingt sous… Parmi mes connaissances, sur cinquante personnes qui m’écriraient des lettres pleines de tendres sentiments, une seule me donnerait vingt sous. Je vous serai donc obligé si vous me donnez vingt sous pour chacune de ces lettres, quoique j’aie fourni plus de travail que vous ne le soupçonnerez jamais pour les rendre à vos yeux dignes des vingt sous. »
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