l’odeur du sel, des feuilles humides et du lait. Je ne demanderais rien à toutes ces choses natales. Elles sont généreuses à l’enfant qu’elles virent naître, d’elles-mêmes lui rapprendraient les choses oubliées. Tout et son parfum d’abord m’annoncerait la mer, mais je ne l’aurais pas encore vue. Je l’entendrais faiblement. Je suivrais un chemin d’aubépines, bien connu jadis, avec attendrissement, avec l’anxiété aussi, par une brusque déchirure de la haie, d’apercevoir tout à coup l’invisible et présente amie, la folle qui se plaint toujours, la vieille reine mélancolique, la mer. Tout à coup je la verrais ; ce serait par un de ces jours de somnolence sous le soleil éclatant où elle réfléchit le ciel bleu comme elle, seulement plus pâle. Des voiles blanches comme des papillons seraient posées sur l’eau immobile, sans plus vouloir bouger, comme pâmées de chaleur. Ou bien la mer serait au contraire agitée, jaune sous le soleil comme un grand champ de boue, avec des soulèvements, qui de si loin paraîtraient fixés, couronnés d’une neige éblouissante.
XXX
voiles au port
Dans le port étroit et long comme une chaussée d’eau entre ses quais peu élevés où brillent les lumières du soir, les passants s’arrêtaient pour regarder, comme de nobles étrangers arrivés de la veille et prêts à repartir,