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LES PLAISIRS ET LES JOURS

contemplation ou de rêverie, moins que cela une bonne odeur, un chant que la brise apporte et voile, doucement la gagner, lui faire pendant un instant oublier son mal, elle sent subitement dans un grand coup au cœur une blessure douloureuse et, plus haut que les vagues ou que les feuilles, dans l’incertitude de l’horizon sylvestre ou marin, elle aperçoit l’indécise image de son invisible et présent vainqueur qui, les yeux brillants à travers les nuages comme le jour où il s’offrit à elle, s’enfuit avec le carquois dont il vient encore de lui décocher une flèche.

Juillet 1893.