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souvient-il, du temps que le bon Porel avait été envoyé aux confins du monde, comme proconsul en Odéonie ? Au nom de Saniette prononcé par Brichot, M. Verdurin lança à sa femme et à Cottard un regard ironique qui démonta le timide. — Vous disiez que Cholet vient de chou, dis-je à Brichot. Est-ce qu’une station où j’ai passé avant d’arriver à Doncières, Saint-Frichoux, vient aussi de chou ? — Non, Saint-Frichoux, c’est Sanctus Fructuosus, comme Sanctus Ferreolus donna Saint-Fargeau, mais ce n’est pas normand du tout. — Il sait trop de choses, il nous ennuie, gloussa doucement la princesse. — Il y a tant d’autres noms qui m’intéressent, mais je ne peux pas tout vous demander en une fois. » Et me tournant vers Cottard : « Est-ce que Mme Putbus est ici ? » lui demandai-je. « Non, Dieu merci, répondit Mme Verdurin qui avait entendu ma question. J’ai tâché de dériver ses villégiatures vers Venise, nous en sommes débarrassés pour cette année. — Je vais avoir moi-même droit à deux arbres, dit M. de Charlus, car j’ai à peu près retenu une petite maison entre Saint-Martin-du-Chêne et Saint-Pierre-des-Ifs. — Mais c’est très près d’ici, j’espère que vous viendrez souvent en compagnie de Charlie Morel. Vous n’aurez qu’à vous entendre avec notre petit groupe pour les trains, vous êtes à deux pas de Doncières », dit Mme Verdurin qui détestait qu’on ne vînt pas par le même train et aux heures où elle envoyait des voitures. Elle savait combien la montée à la Raspelière, même en faisant le tour par des lacis, derrière Féterne, ce qui retardait d’une demi-heure, était dure, elle craignait que ceux qui feraient bande à part ne trouvassent pas de voitures pour les conduire, ou même, étant en réalité restés chez eux, puissent prendre le prétexte de n’en avoir pas trouvé à Doville-Féterne et de ne pas s’être senti la force de faire une telle ascension à pied. À cette invitation