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Une autre opinion que je redoute, parce qu’elle n’offre presque aucune prise à la réplique, c’est celle des gens de bonne foi, qui, en entendant parler de ces controverses, disent : Dieu ! faut-il tant d’esprit pour savoir que chacun doit être maître de ce qui lui appartient ? Voila que vous nous dites maintenant que nous ne sommes plus des voleurs : nous le savions avant vous ; nous n’avons jamais douté de notre droit. A quoi nous attrait-il servi d’apprendre à douter, puisqu’en définitive le droit est indubitable ?

Eh ! braves gens, n’avez-vous jamais entendu parler de révolutions ? Ou bien êtes-vous comme le lièvre, qui retourne toujours au gîte, repassant par le même sentier, après avoir manqué vingt fois d’être pris ? Demandez à M. Laboulaye, un savant jurisconsulte, digne de votre confiance, et qui n’a pas trop d’esprit : il vous dira que toutes les révolutions se font pour ou CONTRE la propriété, et que dans l’un comme dans l’autre cas, il y a grand déplacement d’héritages ! — Vous croyez-vous plus rassurés aujourd’hui qu’en 1848, plus rassurés que ne l’étaient le clergé et la noblesse en 1789 ? — Le gouvernement veille, direz-vous. — Oh ! vous savez bien que les révolutions n’attendent pas la permission des gouvernements. D’ailleurs, quand ce ne sont plus les partageux qui attaquent la propriété, c’est le gouvernement qui la restreint. Et c’est toujours la propriété qui paye, à moins qu’elle n’ait le talent de faire elle-même payer. Or, la théorie que je vous propose a pour but de vous montrer comment, si vous le voulez bien, aucune révolution