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à vendre avec facilités de payement. Nombre de bourgeoisillons, d’ouvriers aisés, piqués d e la tarentule propriétaire, se sont lotis ainsi de terrains à 6 francs,10 francs et jusqu’à 20 francs le mètre, sans songer d’abord que le prix de 10 francs le mètre porte le sol à 100 000 francs l’hectare ; ils ont ainsi acheté des gravats dix fois plus cher que ne se vendent les meilleures prairies naturelles de la Normandie ou de l’Angoumois. Puis, les premiers termes et les frais de mutation payés, ils se sont mis à construire. Pour quelques-uns qui ont pu mener à bout l’entreprise, le plus grand nombre s’y sont épuises. Incapables de payer leurs échéances, ils ont dû abandonner au vendeur, avec le terrain, leur ébauche de construction. Le propriétaire finit ainsi par avoir gratuitement une maison dont l’un a payé les fouilles et les fondations, l’autre les gros murs, celui-ci la toiture, celui-là les aménagements intérieurs. Aussi les facilités de payement s’accordent-elles en raison directe de l’insolvabilité présumée de l’acquéreur : l’intérêt du spéculateur est que son acheteur ne paye pas. Les Parisiens, grâce au nombre sans cesse grossissant des victimes de l’éviction, commencent à comprendre que justice et propriété ne sont pas synonymes.

Terminons cet exposé, populaire par un exemple plus saisissant encore que les précédents :

Un industriel loue a bail de vingt ans, à un prix fabuleux, telle encoignure dans un des plus beaux quartiers de Paris, afin d’y établir un café ; il paye religieusement,