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diviniser la concupiscence, comme le lui a tant reproché le christianisme, est justement celle qui ramène la concupiscence à la conscience. Si jamais l’égoïsme devient identique et adéquat en nous à la Justice ; si la loi morale est recherchée avec le même zèle que le profit et la richesse ; si, comme le prétendait Hobbes, la règle de l’utile peut servir un jour de règle de droit ; et l’on ne peut douter que tel ne soit, en effet, le but de la civilisation ; c’est à la propriété que le monde devra ce miracle.

Suivant que nous envisageons la propriété dans son principe ou dans ses fins, elle nous apparaît comme la plus insigne et la plus lâche des immoralités, ou comme l’idéal de la vertu civile et domestique. «

Regardez cette face vulgaire, sur laquelle ne brille aucune étincelle de génie, d’amour ni d’honneur. L’œil est louche, le sourire faux, le front inaccessible à la honte, les traits heurtés, la mâchoire formidable, non pas mâchoire de lion, mais mâchoire d’hippopotame. L’ensemble de la physionomie semble dire : Tout est néant, fors d’avoir du bien, d’en avoir assez, de quelque manière qu’on l’ait acquis. Le personnage n’est point si grossier qu’il ne comprenne que propriété n’est pas mérite ; mais il ne fait aucun cas du mérite, convaincu que noblesse, bravoure, industrie, talent, probité, tout ce que les hommes estiment, sans l’Avoir, est zéro, et que celui qui petit dire : J’ai, peut fort bien se passer du reste. Il ne disputera pas avec vous sur l’origine et la légitimité de la propriété ; il incline à croire, in petto, que la propriété ne fut dans