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il le reste plus que des nobles et des serfs.

Faites maintenant que cette propriété communale et tous ces domaines nobiliaires puissent être divisés et vendus comme des quartiers de bœuf, qu’ils entrent dans l’échange et se payent en produits, comme s’ils n’étaient eux-mêmes que des produits : bientôt vous verrez l’inégalité décroître, et la propriété, par la faculté même qui lui est donnée d’accaparer, devenir une institution de nivellement. Ici, la tendance est l’opposé de ce qu’elle est là : tandis que la possession, partant de la liberté et de l’égalité primitives, s’enfonce de plus en plus dans l’inégalité et la servitude, la propriété, établie sur l’absolutisme anarchique, anti-unitaire et pourtant accapareuse, cumulant les vices les plus contraires, marche à l’égalité et sert la Justice.

La propriété ne se pose donc point a priori comme droit de l’homme et du citoyen, ainsi qu’on l’a cru jusqu’à ce jour et que semblent le dire les déclarations de 89, 93 et 95 : tous les raisonnements qu’on ferait pour établir à priori le droit de propriété sont des pétitions de principe, et impliquent contradiction. La propriété se révèle, dans ses abus, comme une FONCTION ; et c’est parce qu’elle est une fonction à laquelle tout citoyen est appelé, comme il est appelé à posséder et à produire, qu’elle devient un droit : le droit résultant ici de la destinée, non la destinée du droit. (Voir ma Théorie de l’Impôt, chap. 11, page 76, rapports de la Liberté et de l’État.)

Le caractère fonctionnel et, nous pouvons le dire, libérateur