Page:Proudhon - Théorie de la propriété, 1866.djvu/162

Cette page n’a pas encore été corrigée

comparaison du faux des salaires dans les diverses catégories industrielles, même en tenant compte de toutes les anomalies du marché, combien cette façon mercantiliste de procéder est favorable à l’égalité ; combien, dans la sphère du travail, l’inégalité des biens est loin d’atteindre aux proportions que lui laisse prendre la politique, et qui se manifestent surtout dans la possession territoriale.

Dans une société où la terre est presque le seul capital, et la récolte du cultivateur le seul produit, le souverain, devant tenir compte des inégalités naturelles et n’ayant aucun moyen de l’apprécier, la répartition du sol s’opérera, non d’après le tarif des services, mais plutôt selon la dignité et le rang. De même que de nos jours on donne cent mille francs de rente au général qui commandait à la prise de Sébastopol, et une médaille de cuivre au soldat qui monta à l’assaut, de même, dans une société constituée sur le régime de la possession, le roi donne a ses barons, comtes, dues, princes, mille, dix mille et cent mille hectares de terre, et quatre seulement à l’homme d’armes. Les frais d’exploitation, risques de culture, les déductions a faire à l’échange, les inconvénients de l’isolement, viennent ensuite s’ajouter à ce mode défectueux de répartition pour augmenter l’inégalité. Le petit possesseur, forcé d’implorer l’assistance du grand, devient son fermier ; les petites tenues, se groupant, forment une espèce de commune rustique, dont le principal tenancier devient le seigneur ; si bien qu’enfin, là où d’abord tout le monde était, libre.