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pensée ne conçoit pas d’âme sans corps, d’esprit sans matière, de travail sans capital, de créancier sans débiteur ; de même l’État ne se conçoit pas non plus sans une organisation, sans domaine propre, sans une faculté de requérir, au besoin, les personnes, sans une part dans tous les biens. L’État, par exemple, réclame des citoyens le service militaire ; il les exproprie, moyennant indemnité, pour cause d’intérêt public ; il juge leurs différends et poursuit l’exécution de ses jugements ; en leur garantissant la propriété de leurs découvertes, il se réserve une part dans le bénéfice.

Le souverain de droit divin, antérieur et supérieur à la société, s’arrogeant l’omnipotence et la propriété universelle, les hommes étaient ses serviteurs, et leurs biens lui appartenaient tous. Tel n’est plus aujourd’hui le rapport de l’État avec le citoyen ; tel n’est pas son droit. Ce droit, je l’ai dit, résulte des rapports de groupement, de solidarité, de mutualité, qui donnent l’existence à l’État ; dans aucun cas ce droit ne s’étend plus loin que l’intérêt public et ne se distingue de lui.

b) De ce que, par l’introduction du nouveau droit, tout citoyen est devenu libre, participant à la législation et au gouvernement de son pays, maître absolu de son travail et de son produit, l’égal de tout autre citoyen et de l’État lui-même, il s’ensuit que, sous l’initiative de la Liberté, un vaste mouvement se développe dans le corps social. Par la liberté de l’industrie, tout homme a le droit de se livrer à toute