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Glagny, moyennant 2,861,728 livres tournois. Le même engloutit dans les folies de Versailles plus d’un milliard. Effrayé de l’énormité des dépenses, il fait brûler les mémoires et pièces justificatives.

« On vous a élevé jusqu’au ciel, lui écrit Fénelon en 1695, pour avoir effacé, disait-on, la grandeur de tous vos prédécesseurs ; c’est-à-dire pour avoir appauvri la France entière, afin d’introduire à la cour un luxe monstrueux et incurable. On a rendu votre nom odieux et toute la nation française insupportable à ses voisins. »

La France, hélas ! il faut le rappeler à la décharge de Louis XIV, était pour une forte part complice de cet orgueil et de ces profusions. Son éducation était peu avancée : elle adorait le monarque qui la dévorait ; elle applaudissait à ses plaisirs, à ses amours, à son luxe, à ses victoires, à ses conquêtes, à ses insolences, à sa tyrannie. Elle était encore à moitié féodale, et se souciait aussi peu des douleurs des paysans que de celles des protestants. La révolution s’est faite, et la France n’a pas entièrement dépouillé le vieil homme ; elle est restée, vis-à-vis de ses nouveaux princes, confiante et débonnaire, autant que dans les plus beaux jours de Louis XIV. Armements, constructions, profusions : nous avons eu tout le passé de nos pères. Toute la différence est que, depuis 1789, il y a en France des bourgeois bien appris qui votent l’impôt en faisant semblant de parlementer ; tandis qu’au xviie siècle le roi prenait à sa guise, sans demander permission à personne.