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mentir à la raison moderne il convient, sans anéantir totalement le privilége, de le taxer plus que la fonction, plus que la production, plus que le travail ; que rien n’empêche le propriétaire de joindre à l’avantage de sa rente le bénéfice d’une industrie ; que cela est même de justice et de moralité publique : que du reste, par le dégrèvement général et par le bon marché des produits de toute sorte, il retrouvera autant que la réforme fiscale lui pourrait d’abord faire perdre, et qu’il est grand temps que les propriétaires, après avoir été les plus intéressés à l’aggravation des impôts, soient les plus intéressés à leur dégrèvement.

Nous verrons tout à l’heure quelles compensations la réforme ménage à la propriété foncière.

Rossi, après avoir fait valoir, dans les termes rapportés au chapitre précédent, § 4, la supériorité de l’impôt sur la rente foncière, ajoute, il est vrai, en terminant : « Il faudrait bien se garder d’envisager l’impôt sur la rente foncière comme une rente constituée par l’État sur la propriété foncière, et de le pousser jusqu’aux limites de la spoliation. »

Sans doute l’impôt ne doit pas aller jusqu’à épuiser la totalité de la rente : je ne le demande pas plus que Rossi. La démocratie serait imprudente, selon moi, de le vouloir ; elle irait contre son propre intérêt, contre son propre principe, si elle l’exigeait. À tous les points de vue et pour une foule de raisons, il est meilleur pour la nation, même pour la partie de la nation qui est sans propriété, que le sol, et conséquemment la rente du sol, reste aux mains des