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forcer à produire d’autant. Et notez qu’ici l’impôt, car en vérité il ne s’agit pas d’autre chose, pour être efficace, doit frapper sur le nécessaire, faire juste le contraire de ce que nous demandons aujourd’hui.

L’exagération des charges est le premier et le plus ancien des moyens de civilisation, l’instrument de police le plus énergique. — « Je connais les mœurs des vilains, dit le connétable de Bourbon aux États tenus sous Charles VIII ; si on ne les comprime pas en les surchargeant, bientôt ils deviennent insolents. Si donc vous ôtez entièrement l’impôt des tailles, il est sûr que tout de suite ils se montreront les uns à l’égard des autres comme envers leurs seigneurs, gens rebelles et insupportables. Aussi ne doivent-ils pas connaître la liberté ; il ne leur faut que la dépendance. Pour moi, je juge que cette contribution est la plus forte chaîne qui puisse servir à les contenir. » Les quakers, ces hommes aux mœurs pacifiques et douces, qui ont renouvelé parmi eux la fraternité des premiers chrétiens, professent des maximes toutes semblables : ils disent qu’il faut contenir les ouvriers et ne pas trop les payer. Pareille doctrine a été soutenue à la tribune française : « Le travail est un frein ! » s’écriait M. Guizot. Or, remarquez que M. Guizot n’est ni un homme de l’ancien régime, ni un partisan du droit divin, ni un catholique ; M. Guizot est un homme de 89, royaliste constitutionnel et parlementaire, et protestant.