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équilibrer l’impôt, comme s’il opérait sur des quantités fixes indépendantes les unes des autres et immuables, les valeurs dont se compose la fortune de chaque citoyen ne cessent, pour ainsi dire, de se dérober, de se transformer, d’osciller, de croître et de décroître ; elles passent de main en main, engrenées les unes dans les autres, inégales, variables, et, sous tous les rapports, indéterminables.

L’iniquité de l’impôt ne vient donc pas de lui : elle a son principe dans ces transformations engrenées, dans cette oscillation universelle, dans ces inégalités organiques, qui sans cesse, par leur agitation incoercible, rejettent sur le produit, et conséquemment sur la masse des consommations, ce que l’impôt s’était efforcé de répartir entre les propriétés, les maisons, les industries, les capitaux, les loyers, etc. Elle vient, en un mot, cette iniquité de l’impôt, de la fonction circulatoire, la plus importante de l’économie sociale, qui sans cesse déplace le crédit et le débit du producteur-consommateur, en même temps qu’elle fait monter et descendre les valeurs.

En sorte que, pour opérer la péréquation de l’impôt, il faudrait commencer par opérer la péréquation des fortunes, des capitaux, des produits et des services, ce qui veut dire que, pour opérer une simple réforme, il ne s’agit de rien de moins que d’accomplir une révolution.

Tel est donc le fait essentiel dont il importe que tous, citoyens, législateurs, hommes d’État, agents du fisc, soient préalablement convaincus, non-seule-