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et cette règle, à laquelle correspondait bien le procédé de la déclaration personnelle, conservée en cette matière jusqu’à la Révolution, paraît avoir présidé à la législation des tailles sous toutes les formes. »

Il reste bien entendu, d’ailleurs, que cette application de la justice à la répartition de l’impôt n’avait trait qu’au tiers état et ne concernait en rien les castes supérieures, noblesse et clergé, affranchis par naissance et destination de tout impôt. L’équité fiscale n’embrassait que la roture, la villainie et le servage. Du peuple à la noblesse et au clergé la justice n’avait plus lieu, pas plus qu’entre l’homme et l’animal. Tandis que l’impôt visait pour les uns à la péréquation, il conservait pour les autres son caractère féodal. Les deux principes se trouvant en présence, on pouvait prévoir que le conflit éclaterait tôt ou tard.

La grande conquête de la Révolution est donc l’universalité et la proportionnalité de l’impôt. Or, la revue que nous avons faite au précédent paragraphe nous a démontré qu’en fait, et malgré tout le soin qu’on a pu y apporter, cette proportionnalité n’existe pas ; qu’il est même impossible, au point de vue pratique, qu’elle existe. Il s’agit maintenant de nous élever plus haut et de rechercher si ce principe de proportionnalité, qui d’abord nous est apparu comme l’expression pure, idéale du droit, que la pratique nous a révélé ensuite comme à peu près irréalisable, n’est pas lui-même entaché de quelque erreur ; s’il répond véritablement à l’idée que nous nous faisons de la justice écono-