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nécessaires ? La belle spéculation en vérité ! On restituera au travailleur trois francs d’impôt sur sa subsistance et on lui en prendra trente sur ses plaisirs !… Il gagnera 75 centimes sur le cuir de ses bottes, et pour mener sa famille quatre fois par an à la campagne, il payera dix francs de plus pour les voitures ! Un petit bourgeois dépense 1,000 fr. par an pour la femme de ménage, la ravaudeuse, la lingère, la blanchisseuse, les commissionnaires ; et si, par une économie mieux entendue et qui accommode toutes parties, il prend une domestique, le fisc, dans l’intérêt des mœurs, flétrira cette pensée d’épargne !… » (Système des contradictions économiques.)

En résumé, l’impôt somptuaire, insignifiant comme ressource fiscale, ne peut se légitimer que comme mesure de police : l’impôt des chiens, aisé à motiver par des considérations de décence et d’hygiène, vaut à peine comme rendement ses frais de perception. L’impôt somptuaire est anti-esthétique ; il proscrirait l’art au profit de l’imagerie, les chefs-d’œuvre des maîtres pour les cantiques de mission et les Noëls de La Monnoye. L’impôt sur le luxe, enfin, renouvelé des anciennes lois somptuaires, lois essentiellement aristocratiques, qui assignaient à chaque classe de la société son costume et ses étoffes, révolte notre sentiment démocratique et égalitaire : ce serait la consécration officielle de l’inégalité des conditions et des fortunes. La république de 1848 en a fait un malheureux essai, quand elle a augmenté de dix francs le prix des ports d’armes, et taxé les huîtres à l’octroi de