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par des raisons de commodo et incommodo que je n’ai point à discuter ici, conserva l’impôt du sang ; celle de 1830 le maintint à son tour ; la République de 1848, enfin, ne songea nullement à l’abroger, loin de là. D’abord elle n’abolit pas la loi du 21 mars 1832 sur le recrutement ; puis elle reconnut formellement, art. 102 de la constitution, la faculté à tout citoyen de s’exonérer du service militaire, en même temps qu’elle interdit, art. 104, à l’armée les discussions politiques.

Le service militaire ainsi détourné de sa véritable notion, les conséquences les plus subversives devaient en sortir en foule. La première et la plus désastreuse est la conscription. Tout a été dit à cet égard : la conscription pèse surtout sur le peuple, tandis que les classes aisées s’exonèrent à prix d’argent, si mieux n’aiment leurs fils, après une année ou deux d’études spéciales, entrer, comme on dit, dans le régiment des officiers. Et ce qui prouve une fois de plus combien le mode de recrutement est indépendant de l’idée dynastique et de la forme du gouvernement, c’est que la conscription existe dans la libre Belgique, tout comme en Russie et en France, tandis qu’elle est repoussée en Prusse et en Angleterre.

Combinée ensuite avec la faculté de remplacement, la conscription a atteint en France, au point de vue de l’égalité et de la quotité de l’impôt, le dernier degré d’anomalie et d’exorbitance. D’abord, le gouvernement, sous la pression des circonstances, je veux le croire, a porté la conscription à des chiffres inouïs,