Page:Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/144

Cette page a été validée par deux contributeurs.

la fréquence des relations, instruments d’utilité universelle, et non pas simplement locale, il est bien difficile de conserver la prestation et la corvée. Ce serait ramener le pays au servage, ce qui sort complétement du droit moderne et de l’hypothèse.

« Le système des corvées, dit M. Hippolyte Passy, se modifia sous l’influence des progrès successifs de l’industrie et de la richesse : l’impôt s’étendit graduellement des personnes aux choses ; des dîmes furent prélevées sur les troupeaux, les récoltes, sur la plupart des fruits du travail, et ce fut au moyen des ressources réalisées en nature que s’effectua le solde d’une partie notable des dépenses collectives. »

L’impôt en nature a donc formé, avec les prestations et les corvées, une branche importante du revenu public dans l’antiquité et pendant l’ère féodale. C’est le pendant du troc ou de l’échange en nature, alors que les populations, n’ayant pas encore acquis l’usage de la monnaie, échangeaient les produits de leur sol les uns contre les autres, ainsi qu’on le voit dans la Bible et dans Homère. À mesure que le commerce se perfectionne, l’impôt en prend le signe et l’allure ; et le moment vient où le seigneur féodal et le fisc, ne sachant que faire des corvées de leurs serfs, leur offrent la liberté à la condition d’être payés en espèces. Or l’humanité est comme le chariot d’Ézéchiel, qui avance toujours et ne rétrograde jamais.

Par suite de la transformation insensible de l’économie publique et de la séparation des industries,