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CHAPITRE XIV.


RÉSUMÉ ET CONCLUSION.


On a dit de Newton, pour exprimer l’immensité de ses découvertes, qu’il avait révélé l’abîme de l’ignorance humaine.

Il n’y a point ici de Newton, et nul ne peut revendiquer dans la science économique une part égale à celle que la postérité assigne à ce grand homme dans la science de l’univers. Mais j’ose dire qu’il y a ici plus que ce qu’a jamais deviné Newton. La profondeur des cieux n’égale pas la profondeur de notre intelligence, au sein de laquelle se meuvent de merveilleux systèmes. On dirait une région nouvelle, inconnue, qui existe hors de l’espace et du temps, comme les royaumes célestes et les demeures infernales, et sur laquelle notre œil plonge, avec une admiration muette, comme dans un abîme sans fond.

Non secùs ac si quâ penitùs vi terra dehiscens
Infernas reseret sedes et regna recludat
Pallida, Dis invisa, superque immane barathrum
Cernatur, trepidentque immisso lumine Manes.
_________________Virgil. Æneid. lib. viii.

Là se pressent, se heurtent, se balancent, des forces éternelles ; là se dévoilent les mystères de la Providence, et les secrets de la fatalité paraissent à découvert. C’est l’invisible se faisant visible, l’impalpable rendu matériel, l’idée devenue réalité, et réalité mille lois plus merveilleuse, plus grandiose que les plus fantastiques utopies. Jusqu’à présent nous ne voyons pas, dans sa simple formule, l'unité de cette vaste machine ; la synthèse de ces gigantesques engrenages, où se broient le bien-être et la misère des générations, et qui façonnent une création nouvelle, nous échappe encore. Mais déjà nous savons que rien de ce qui se passe dans l’économie