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Le système du docteur G…, fort honnête homme au demeurant, et aussi bon logicien qu’homme du monde, est suivi clandestinement, à Paris, par des chirurgiens qui s’en font une spécialité, et y gagnent de rapides fortunes. Le poignard de ces assassins va chercher le fœtus jusqu’au fond de la matrice ; l’enfant tué ou séparé de son pédoncule, la nature rejette d’elle-même un fruit mort, et cela s’appelle en langage économique, prévenir l’excès de population, et en style de journaux, cacher une faute. Dans les villes de provinces, des médecins, des matrones, imitant cette industrie, font commerce de drogues évacuatives, d’après le principe de haute économie que c’est un crime de donner le jour à des malheureux, et une obligation de conscience de limiter le nombre de ses enfants. Et la police, plus malthusienne que Malthus, la police, qui sait découvrir une réunion de vingt ouvriers agitant une question de salaires, ferme les yeux sur ces infanticides, auxquels le jury, non moins éclairé sur le principe de population que la police, découvre une foule de circonstances atténuantes.

Le système du docteur G… est le complément obligé de la contrainte morale et physique des économistes, comme de la stérilité érotico-bachique du phalanstère. Toutes ces doctrines, dernier effort d’un sensualisme désespéré, sont connexes et solidaires ; elles partent du même préjugé, l’accroissement de population plus rapide dans une société régulière que celui des subsistances. Quant aux résultats, ils restent invariablement les mêmes : augmentation de misère, de vice et de crime ; dissolution du lien familial, rétrogradation du mouvement économique, proscription forcée des pauvres, des orphelins, des vieillards, de toutes les bouches inutiles ; justification de l’assassinat, anathème à la fraternité et à la justice.

3o Système des interruptions. J’entends par là une précaution très-simple, mais sur le succès de laquelle on n’est pas du tout d’accord, qui consiste à s’abstenir du commerce amoureux pendant les huit ou quinze jours qui précèdent et qui suivent le flux menstruel : la femme, hors le temps des règles, étant, dit-on, naturellement stérile.

Ce genre d’abstinence rentre tout à fait dans le goût du physical restraint. J’ignore jusqu’à quel point la physiologie et l’expérience confirment l’utilité de cette méthode, dont je n’ai, du reste, à m’occuper qu’au point de vue économique.