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Ces conclusions, et le problème qui les termine, sont l’acte de déchéance de l’économie politique.


§ III. — Principe d’équilibre de la population.


I.

Le problème de la population exigerait à lui seul deux volumes : l’espace me manque, et je ne puis, sans tromper le lecteur, ajourner davantage la solution. Qu’on m’excuse donc si, au lieu d’un livre, je n’ai pu présenter ici qu’un programme ; et puisse ce faible essai inspirer un plus éloquent ! Réformiste sincère, je ne songe point à m’approprier la vérité : je cherche, non des disciples, mais des auxiliaires.

Le problème de la population ayant été posé par les économistes entre les hommes et les subsistances, la solution ne pouvait être douteuse : c’était la mort. Tuer ou empêcher de naître, per fas et nefas, voilà où devait aboutir, bon gré, mal gré, la théorie de Malthus ; voilà quelle devait être la pratique des nations, l’antidote généralement adopté et préconisé contre la misère. Fidèle à son principe de propriété et d’arbitraire, l’économie politique devait finir comme toute législation fondée sur la propriété et l’autorité : après avoir donné sa charte, déroulé son code, ses rubriques, ses formules, il lui restait à trouver sa sanction, et cette sanction elle l’a demandée à la force, La théorie de Malthus est le code pénal de l’économie politique.

Que dit au contraire l’économie sociale, la véritable science économique ? C’est que tout organisme doit trouver son équilibre en lui-même, et n’avoir besoin contre l’anarchie de ses éléments ni de prévention ni de répression. Résolvez vos contradictions, nous crie-t-elle, établissez la proportion des valeurs, cherchez la loi de l’échange, cette loi qui est la justice même : et d’abord vous découvrirez le bien-être, et à la suite de ce bien-être une loi supérieure, l’harmonie du globe et de l’humanité…

Montrons d’abord comment, de l’arbitraire économique sur le problème de la population, est résultée la corruption de la morale.

Partant de l’hypothèse qu’il n’existe ni loi de proportion entre les valeurs, ni organisation du travail, ni principe de répartition ; forcée de dire que la justice est un mot, l’égalité une chimère, le bien-être pour tout le monde un rêve paradisiaque dont la réalité ne se trouve point ici-bas ; con-