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CHAPITRE XII.


NEUVIÈME ÉPOQUE. — LA COMMUNAUTÉ.
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A mon ami Villegardelle, communiste.


Mon cher Villegardelle,

J’ai reçu, chacune en leur temps, vos deux dernières publications, et je vous en remercie.

J’ai lu l’Accord des intérêts avec le charme que devaient me procurer votre esprit si fin, votre pensée vive et légère, votre expression toujours sceptique et narquoise. Que chercher, en effet, en un écrit communiste, si ce n’est l’imagination et le talent de l’écrivain ?…

Ce qui m’a frappé dans l’Histoire des idées sociales, est le sous-titre : Les socialistes modernes devancés et dépassés par les anciens penseurs et philosophes. Je trouve à cela, je vous l’avoue, beaucoup moins de malice que de naïveté. La belle recommandation pour notre cause, je vous prie, de faire savoir à un public imbu des idées de progrès, que l’invention faiblit parmi nous à mesure que la civilisation se développe sur sa base propriétaire, et de crier sur les toits, chose vraie du reste, que le socialisme est en décadence depuis Platon et Pythagore ! Et quel avertissement au lecteur, en tête d’une publication communiste ! Vous avez fréquenté le phalastère, mon cher Villegardelle, et vous êtes si peu habile !…

Mais je goûte fort le nom d’utopie, que vous donnez en général à tout projet de réforme conçu en sens contraire de la propriété. En fait et en droit, le socialisme, protestant éternellement contre la raison et la pratique sociale, ne peut être rien, n’est rien. Au rebours de ces entraves au libre commerce, dont les économistes espèrent triompher avec le temps et qui reviennent toujours, le socialisme ne vient ja-