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bestiaux, dit M. Blanqui, n’est qu’un impôt prélevé sur la communauté, au profit de quelques-uns. Quelques efforts que l’on fasse, la question sera toujours de savoir jusqu’à quand la nation s’imposera de telles charges, en vue d’améliorations qu’on promet toujours, et qui n’arrivent jamais, parce qu’elles ne peuvent arriver par cette voie… »

« Le régime prohibitif ne tend parmi nous, comme dans le reste de l’Europe, qu’à donner une impulsion factice et dangereuse à certaines industries, organisées selon la méthode anglaise, au profit presque exclusif du capital. Il exagère la production et il restreint en même temps la consommation pour les entraves qu’il impose à l’importation étrangère, toujours suivies de représailles. Il substitue les luttes violentes de la concurrence intérieure, à l’émulation de la concurrence extérieure. Il détruit les heureux effets de la division du travail entre les nations. Il maintient les vieilles hostilités parmi elles… Il entretient les divisions profondes qui séparent trop souvent le travail et le capital, et il engendre le paupérisme par le déclassement brusque des ouvriers. » (Journal des Économistes, février 1842.)

Tous ces effets du régime protecteur, signalés par M. Blanqui, sont vrais et déposent contre les entraves apportées à la liberté du commerce. Malheureusement nous les verrons naître tout à l’heure, avec une intensité non moins grande, de la liberté elle-même ; tellement que si, pour guérir le mal, on devait conclure avec M. Blanqui à l’extirpation absolue de la cause morbifique, il faudrait conclure à la fois contre l’état, contre la propriété, contre l’industrie, contre l’économie politique. Mais nous n’en sommes pas encore à l’antinomie : poursuivons nos citations.

« Le privilége, le monopole, la protection, qui des uns retombe en cascade sur les autres, excepté sur le malheureux ouvrier, ont amené dans la distribution des produits, but de tout travail, des monstruosités. Nulle part la liberté n’a passé son bienfaisant niveau sur la puissance d’agir ; les entraves ont produit la fraude ; le larcin, le mensonge, la violence, sont les auxiliaires du travail. L’avarice réclame aujourd’hui sans honte, et comme un droit, le moyen d’accumuler aux dépens de tous : la lutte est partout, l’harmonie nulle part.

» Et c’est cependant vers un résultat si désastreux que nous courons nous-mêmes. Dans un pays où le peuple n’est rien encore, on comprend cette persévérance d’exploitation ;