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et la misère du peuple qu’elle affamait, forçassent les souverains à demander grâce, et à rappeler chez eux ces maîtres étrangers, même en leur accordant de nouveaux privilèges, c’est-à-dire de nouveaux moyens d’oppression. Dans cet état de choses, devant la ligue hanséatique, les rois tremblèrent… Enfin il y eut des sociétés secrètes, une franc-maçonnerie de l’argent, des initiations, des tortures à subir pour être admis dans les comptoirs de la ligue, véritables forteresses bâties au sein des villes, comme l’étaient les factoreries de Gênes et de Venise dans le Levant. » (Augier, Histoire du Crédit.)

En deux mots, les villes créèrent une force publique ; et pour que cette force fût régulièrement salariée, elles s’imposèrent une cotisation. Ce fut l’origine du revenu public. Les rois s’empressèrent d’imiter cette innovation ; et comme ils empruntaient toujours, à la suite du revenu public ne tarda pas à se former, par une succession d’emprunts, la dette publique. Ainsi nous voyons le crédit naître et se développer spontanément au sein du travail et du servage ; il grandit ensuite par la liberté, et devient à son tour conquérant et souverain. C’est alors que l’état l’adopte, d’abord pour se ruiner de plus en plus en augmentant sa consommation improductive, plus tard pour accroître ses possessions, et enfin pour s’attacher la féodalité nouvelle.

« Bientôt, continue M. Augier, les rois, à l’exemple des communes, se mirent à faire la guerre avec l’argent. Louis XI est le premier roi qui ait pensé sainement sur l’argent. Il prêta 300,000 écus d’or à Jean d’Aragon, après s’être fait engager pour sûreté les comtés de Cerdagne et de Roussillon. Il prêta aussi 20,000 écus d’or à Henri VI d’Angleterre, et reçut en hypothèque la ville de Calais… Ainsi à la guerre de dévastation succédait la guerre des capitaux. »

« L’an 1509, le roi Louis XII se chargea de payer la garnison de Vérone, qui appartenait à Maximilien ; il exigea que le prince lui remît, pour sûreté de cette somme, et de toutes celles qu’il pourrait encore lui emprunter par la suite, les deux citadelles de Vérone, et la place du Vallegio… Or, si le bon roi Louis payait la garnison à condition que la ville lui appartiendrait, nous demandons ce que l’empereur Maximilien retirait de cet emprunt, si ce n’est de prêter ses hommes ? »

Le même Maximilien, que les historiens du temps ont surnommé Maximilien sans argent, se trouvant à Bruges, fut