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de ses écus, il l’éprouve aussi vivement que le capitaliste dont l’avoir consiste en terres, maisons, machines, etc., éprouve le besoin, pour son entreprise, de se procurer des écus.

Pour que ces deux capitalistes fassent produire leurs capitaux, il faut donc qu’ils les associent. Mais l’association répugne à l’homme autant qu’elle lui est nécessaire ; et ni l’industriel, ni l’homme d’argent, tout en cherchant à s’entendre, ne consentiraient à s’associer. Un moyen se présente de contenter leur désir sans forcer leur répugnance : c’est que le détenteur du numéraire prête ses fonds à l’industriel, en recevant pour gage les capitaux mobiliers et immobiliers de celui-ci, plus un bénéfice ou intérêt.

Telle est, en somme, la première manifestation du crédit, ou, comme parle l’école, sa thèse.

Il en résulte que la monnaie, tout élevée qu’elle soit au dessus des autres marchandises, apparaît bientôt, en tant qu’instrument d’échange, avec de notables inconvénients, le poids, le volume, l’usure, l’altération, la rareté, les embarras du transport, etc. ; — que si l’argent considéré en lui-même, dans sa matière et sa valeur, est un gage parfait du crédit, puisque à l’aide de ce gage, signé du souverain, acceptable en tout temps et contre toute espèce de produits, on est sûr de se procurer tous les biens possibles, cependant, comme représentant des valeurs et moyen de circulation, ce même argent offre des désavantages et laisse à désirer, en un mot, est un signe imparfait du crédit.

C’est à réparer ce vice propre du numéraire que nous allons voir le génie commercial appliquer tous ses efforts. Le second terme, la série antithétique des institutions de crédit, est l’inverse, la négation, en un certain sens, de la première : elle comprend les banques de circulation et d’escompte, et tout ce qui a rapport aux papiers de banque, papiers-monnaies et monnaies de papier, assignats, etc. Voici le mécanisme de cette génération.

Que le lecteur me pardonne de le rappeler constamment à ces formules de métaphysique, auxquelles j’ai ramené déjà toutes les phases antérieures, et dans lesquelles je fais rentrer encore les diverses formes du crédit. En y réfléchissant, on comprendra, je l’espère, que cet appareil si disgracieux à première vue, si étranger à nos habitudes littéraires, est, après tout, l’algèbre de la société, l’instrument intellectuel qui seul, en nous donnant la clef de l’histoire, nous fournit