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soit en objets de consommation domestique ou personnelle, coûte trois fois plus qu’il ne vaut. En un mot, l’état, et comme organe improductif de la police, et comme producteur pour la part du travail collectif qu’il s’est attribuée, vit uniquement de subventions : comment, par quelle vertu magique, par quelle transformation inouïe deviendrait-il tout à coup le dispensateur des capitaux dont il ne possède pas le premier centime ? comment l’état, l’improductivité même, à qui par conséquent l’épargne est essentiellement antipathique, deviendrait-il le banquier national, le commanditaire universel ?

Au point de vue de la production, comme à celui de la propriété, il faut donc revenir à l’hypothèse d’une solidarité tacite, dont l’état se ferait discrètement l’intermédiaire, et qu’il exploiterait à son profit, jusqu’au jour où il lui serait permis de l’avouer tout haut et d’en décréter les articles. Car, avant d’avoir vu fonctionner cette grande machine, je ne puis penser qu’il s’agisse simplement d’une entreprise de banque, formée à l’aide de capitaux privés, et dont la gestion seulement serait confiée à des fonctionnaires publics : en quoi une telle entreprise, alors même qu’elle procurerait au commerce des capitaux à meilleur marché, différerait-elle de toutes les entreprises analogues ? Ce serait créer pour l’état, sans qu’il y mît rien du sien, une nouvelle source de revenus : sauf le danger de laisser entre les mains du pouvoir des sommes considérables, je ne vois pas ce que le progrès, ce que la société y gagneraient. L’organisation du crédit par l’état doit aller plus au fond des choses ; et l’on me permettra de poursuivre mes investigations…

Mais oui bien, dit-on, l’état possède un capital, puisqu’il a le plus gros, le plus impérissable des revenus, puisqu’il a l’impôt. Dût-il augmenter cet impôt de quelques centimes additionnels, ne peut-il donc s’en servir pour combiner, exécuter et gager les plus vastes opérations de crédit ? Et même sans recourir à une augmentation d’impôt, qui empêche l’état, sous la garantie limitée ou illimitée de la nation, et en vertu d’un vote des représentents de la nation, de créer un système complet de banque agricole et industrielle ?

Mais de deux choses l’une : ou l’on entend faire du crédit, sous prétexte d’intérêt général, l’objet d’un monopole au profit de l’état ; ou bien l’on admet que la banque nationale, de même qu’aujourd’hui la banque de France, fonc-