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toujours prévalu, etc. » Qu’est-ce au fond que cette concession de monopole ? Une simple reconnaissance, une déclaration. La société, voulant favoriser une industrie nouvelle et jouir des avantages qu’elle promet, transige avec l’inventeur comme elle a transigé avec le colon : elle lui garantit le monopole de son industrie pour un temps ; mais elle ne crée pas le monopole. Le monopole existe par le fait même de l’invention ; et c’est la reconnaissance du monopole qui constitue la société.

Cette équivoque dissipée, je passe aux contradictions de la loi.

« Toutes les nations industrielles ont adopté l’établissement d’un monopole temporaire, comme prix d’un contrat entre la société et l’inventeur… Je ne m’accoutume pas à croire que tous les législateurs de tous les pays ont commis une spoliation. »

M. Renouard, si jamais il lit cet ouvrage, me rendra la justice de reconnaître qu’en le citant, ce n’est pas sa pensée que je critique : il a senti lui-même les contradictions de la loi sur les brevets. Tout ce que je prétends, c’est de ramener cette contradiction au système général.

Pourquoi, d’abord, un monopole temporaire dans l’industrie, tandis que le monopole terrien est perpétuel ? Les Égyptiens avaient été plus conséquents : chez eux, ces deux monopoles étaient également héréditaires, perpétuels, inviolables. Je sais quelles considérations on a fait valoir contre la perpétuité de la propriété littéraire, et je les admets toutes : mais ces considérations s’appliquent également bien à la propriété foncière ; de plus, elles laissent subsister dans leur entier tous les arguments qu’on y oppose. Quel est donc le secret de toutes ces variations du législateur ? — Du reste, je n’ai plus besoin de dire qu’en relevant cette incohérence, je ne veux ni calomnier ni faire de satire : je reconnais que le législateur s’est déterminé, non pas volontairement, mais nécessairement.

Mais la contradiction la plus flagrante est celle qui résulte du dispositif de la loi. Titre IV, art. 30, § 3, il est dit : « Si le brevet porte sur des principes, méthodes, systèmes, découvertes, conceptions théoriques ou purement scientifiques,